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    A Cuba, les gays racontent les persécutions de la révolution.

    REPORTAGE. Les excuses de Fidel Castro pour les discriminations subies par les homos cubains dans les années 60 et 70 ont rouvert des plaies. Les langues se délient pour témoigner du climat de persécution vécu à l'époque, et pas tout à fait révolu.

    Ce «mea culpa» (lire notre article) de Fidel Castro a en fait rouvert un chapitre sombre de la révolution, quand gays et lesbiennes, mais aussi artistes ou religieux étaient envoyés dans des camps de travail.

    Travaux forcés.

    De 1965 à 1968, des centaines de personnes considérées comme «idéologiquement déviantes» ont ainsi été internées dans des Unités militaires d'aide à la production (UMAP). «Ce fut une période sombre, douloureuse, frustrante, qui a bouleversé ma vie», raconte le pasteur Alberto Gonzalez, 67 ans. Comme le poète Pablo Milanes ou le cardinal Jaime Ortega, aujourd'hui archevêque de la Havane, il a été soumis aux travaux forcés et à des traitements humiliants dans ces camps entourés de barbelés, sous le regard de soldats armés.

    «Mon père était communiste et le justifiait. J'ai souffert, mais j'ai décidé de rester à Cuba et je n'ai aucun remords. Il est toujours temps de reconnaître ses erreurs. Ce qu'a dit Fidel constitue une reconnaissance précieuse d'un point de vue historique», ajoute le pasteur.

    Homophobie institutionnelle.

    Cette reconnaissance a eu lieu fin août, lorsque le dirigeant cubain a déclaré au quotidien mexicain la Jornada: «s'il y a quelqu'un de responsable [de ces discriminations], c'est moi. Mais c'est sûr qu'à cette époque je ne pouvais pas m'occuper de ce sujet... J'étais immergé dans la crise d'octobre (1962), la guerre, les questions politiques».

    Mais même après le démantèlement des UMAP, il a fallu attendre 1979 pour que les relations homosexuelles soient dépénalisées et l'homophobie institutionnelle est restée vive dans les années 1970 et 1980. Les autorités ont ainsi interdit la publication d'oeuvres des écrivains Virgilio Pinera et Reinaldo Arenas, car ils étaient gays. «J'ai été privée de liberté pendant six mois car je m'étais épilé les sourcils», témoigne la transsexuelle Sisi, employée au Centre national de l'éducation sexuelle dirigé par la nièce de Fidel Castro et fille du président Raul, Mariela.

    «C'était horrible»

    «A cette époque, on cherchait à détecter les homosexuels. C'était horrible. Par ignorance, c'était vu comme une aberration et des atrocités ont été commises. Il y a eu des progrès, mais il reste beaucoup à faire et ce qu'a dit le Commandante (Fidel Castro) est un coup de pouce», ajoute-t-il.

    La situation s'est en effet améliorée pour les homos, grâce notamment à Mariela Castro qui milite depuis des années pour les droits des LGBT. Depuis 2008, les opérations de changement de sexe sont ainsi autorisées dans l'île communiste. Mais tout n'est pas rose pour autant, et des militants dénoncent l'écart entre les discours de la nièce de Castro et la réalité au quotidien.

    «Qui va réparer les souffrances subies ?»

    Mario Delgado, 29 ans, affirme pour sa part avoir été exclu de l'Université pour avoir organisé l'élection de «Mister Gay». «Les excuses de Fidel ne signifient rien tant que la police n'arrête pas de nous persécuter», juge-t-il. «Qui va réparer les souffrances subies ?», demande également Aliomar Jankajer, président de la Fondation LGBT Reinaldo Arneas. Le chercheur homosexuel Tomas Fernandez évoque, lui, des «excès» propres aux processus révolutionnaires «qu'il ne faut pas oublier pour que ces erreurs ne se reproduisent pas».

     
    Le célèbre film Fraise et chocolat de Tomas Gutierrez Alea (1993, bande-annonce)
    a aussi contribué à sensibiliser la population sur les vexations subies par les homos à Cuba.

    Sources : Têtu


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